27.06.2021 : Marc 5. 21-43 – Fille Jaïros

Deux guérisons féminines

Introduction

Le récit qui précède est la guérison du démoniaque de Gérasa en terre étrangère. Jésus a juste fait un aller-retour en terre étrangère pour libérer un homme qui était lié en envoyant ses démons dans un troupeau de cochons. Quand il retourne en terre d’Israël, on pourrait penser que c’est pour trouver une situation plus apaisée, mais le voilà harcelé par une foule qu ile presse de toutes parts.

Points d’exégèse

Attention sur deux points.

Une femme impure

Les deux personnages principaux du récit sont un chef religieux, Jaïros, et une femme atteinte d’une perte de sang. Dans un premier temps, tout oppose les deux personnages. Le premier est un chef religieux, respecté, et en plus tout le monde le plaint car la maladie d’un enfant suscite naturellement la compassion.

La seconde est une femme ruinée qui a dépensé tout son argent auprès de médecins qui ont été incapables de la guérir, et qui est atteinte d’une maladie qui la rend en permanence impure comme le sont les femmes pendant leurs périodes.

Deux récits enchâssés

Nous avons vu que tout opposait Jaïros à la femme atteinte d’une perte de sang. L’évangéliste suggère le rapprochement entre les deux guérisons par le nombre douze : la femme est malade depuis douze ans, ce qui est précisément l’âge de la fille. Les deux récits, enchâssés l’un dans l’autre, deviennent proches car ils parlent de la difficulté de deux femmes à trouver leur identité de femme.

La première est touchée au creux de sa féminité et la seconde est à l’âge où elle devient nubile et on peut imaginer que la maladie et liée à sa situation.

Pistes d’actualisation

1er thème : Jésus et la foule

La foule est très présente dans ce récit. Quand Jésus accompagne Jaïros, elle le presse, au point que la femme pense pouvoir toucher Jésus de façon anonyme, et lorsqu’il arrive chez Jaïros, il la renvoie car la maladie d’une fillette est une question intime qui n’a pas besoin de témoins.

Dans l’évangile, Jésus a eu compassion des foules parce qu’elles étaient comme des brebis qui n’ont pas de berger (Mt 9.36), mais il a toujours refusé de prendre la tête de la foule pour lui montrer le bon chemin. Il ne l’a pas fait car il ne veut pas s’adresser à des foules, mais à des sujets uniques. Quand il rencontre un homme, il commence par le sortir de la foule, il le défoule.

2e thème : Guérison rendue

Lorsque la femme atteinte d’une perte de sang touche le manteau de Jésus, elle est dans une démarche superstitieuse. Le texte dit qu’elle a tout essayé pour guérir et qu’elle a d’ailleurs dépensé tout son argent pour cela. Lorsque Jésus s’annonce, comme il est précédé d’une réputation de thaumaturge, elle est prête à essayer ça aussi, alors elle touche son manteau discrètement.

Lorsque Jésus demande qui l’a touché, elle aurait pu se sauver, se réfugier dans l’anonymat de la foule, mais elle sait qu’elle est guérie, alors elle se jette aux pieds de Jésus et lui dit toute la vérité. Elle n’est plus dans une démarche superstitieuse, mais dans une quête de vérité. C’est pourquoi Jésus lui rend sa guérison : « Ma fille, ta foi t’a sauvée ; va en paix et sois guérie de ton mal. » Une façon de lui dire : ta guérison, tu ne l’as pas volée, tu la mérites.

3e thème : Secret messianique

Lorsque Jésus relève la fille de Jaïros, on peut penser qu’il profite de cette guérison pour renforcer son ministère, mais au lieu de cela « Il leur fit de sévères recommandations pour que personne ne le sache. »

Cette discrétion de Jésus nous étonne, mais on la comprend quand on pense à la foule. Elle ne suit pas Jésus pour sa parole mais parce qu’elle veut voir des miracles. Jésus n’a pas guéri pour soigner sa popularité, mais pour poser des signes de la compassion de Dieu. Le problème avec les miracles, c’est que les hommes s’attachent au signe sans prêter attention à ce qu’il désigne.

Ce qui est premier dans l’évangile, c’est la Parole et le signe ne fait que désigner l’Évangile, alors que la plupart de ses interlocuteurs veulent le signe et pas la parole.

Une illustration : La foi dans nos deuils

Lorsqu’on apprend à Jaïros que sa fille est morte, Jésus lui dit : N’aie pas peur, crois seulement. Nous savons que la foi ne nous libère pas de l’épreuve du deuil. Face à la mort, qu’apporte la foi ? L’apôtre Paul dit dans l’épître aux Thessaloniciens : Ne vous attristez pas comme les autres qui n’ont pas d’espérance (1 Th 4.13). Paul ne dit pas qu’il ne faut pas être triste dans le deuil, mais qu’il ne faut être triste comme les autres. À cause de l’espérance, notre tristesse peut être différente, et cette différence repose sur la confiance. C’est la raison pour laquelle ce verset : Ne crains pas, crois seulement est parfois écrit sur les faire-part de deuil et sur les pierres tombales.

Pour aller plus loin :
Le théologien Antoine Nouis reçoit Florence Taubmann, pasteure, pour commenter le texte biblique de Marc 5, 21-43 : https://campusprotestant.com/video/la_fille_de_jairos/

Production : Fondation Bersier
Intervenant : Antoine Nouis